Sur les Traces des Ducs de Savoie raconté par Mathilde
119 km – 7250 m D+ – Courmayeur-Bourg St Maurice-Chamonix
Un mois déjà que la course est terminée, et je n’ai toujours pas daigné (ou osé ?) faire un petit récit… Le temps passe, il est donc temps de le faire ; non seulement pour vous faire partager mon expérience et surtout les photos qui sont peut-être le plus beau témoignage, mais également pour fixer sur papier tous ces petits souvenirs, intercalés dans les plus grands mais qui font le charme de la mémoire…
C’est au départ un 31 décembre 2015 que je me décide enfin à m’inscrire à la TDS. Yves (Chevalier) et Philippe (Petazzoni) se sont eux déjà inscrits depuis plusieurs semaines maintenant, il ne me reste que quelques jours pour le faire. Comme bonne résolution de nouvelle année, je décide donc de le faire (j’hésitais entre ça et arrêter le chocolat, ma gourmandise aura eu le dessus).

Courant janvier, nous avons tous les 3 le résultat du tirage au sort, car pour la 1ère fois la TDS était remplie et il y avait un peu plus d’inscrits que de places. Nous avions tout de même plus de 9 chances sur 10 d’être tirés au sort. Pour les non-initiés, rappelons que la TDS fait partie des courses autour du Mont Blanc, ayant lieu chaque année la dernière semaine d’août. La course la plus mythique est l’UTMB (170 km), beaucoup de prétendants, peu d’élus -une chance sur 3 ou 4 au tirage au sort !. Il y a deux ans, en 2014 j’avais participé à la CCC. Yves et Philippe en avaient fait de même en 2015. Nous voici donc tous les trois embarqués dans une belle aventure. La TDS avec ses 119 km et 7250 m de dénivelé n’est pas la plus longue mais est réputée comme difficile (plus difficile que l’UTMB pour certains !), d’où mes hésitations avant de m’inscrire. Mais c’est une course tellement belle qu’elle en ferait oublier ses difficultés –principalement de grandes montées et grandes descentes, terrain parfois caillouteux, sentiers peu marqués, passages raides.
Je commence mon entraînement début juin, prévoyant 3 mois de préparation à raison de 4 entraînements par semaine environ (course à pied mais aussi vélo et natation). Durant cette préparation, une inquiétude me poursuit : je souffre depuis quelques mois d’un engourdissement dans la jambe à chaque fois que je cours longtemps sur du plat… j’en ai fait les frais à la course du Périgord au mois de mai où j’ai couru une quarantaine de km avec des fourmis dans la jambe. 3 séances chez l’étiopathe, et j’essaie de dissiper mon inquiétude. Il aura fallu attendre la course pour être rassurée, car jusqu’au dernier footing de préparation j’ai eu encore parfois de mauvaises sensations persistantes. Fort heureusement je n’en ai pas souffert pendant la TDS, les séances ostéo ont dû agir, tardivement mais qu’importe ! Il faut dire que sur la TDS on marche plus qu’on ne court, ce qui explique peut-être aussi que je n’aie pas souffert des mêmes symptômes.
Mercredi 24 août, 3h30h du matin : Pascal m’emmène de St Gervais, où nous logeons, jusqu’aux Houches où m’attend une navette direction Courmayeur, pour le départ de la course donné à 6h. Nous avons prévu de nous y retrouver avec Yves et Philippe qui prenaient d’autres navettes. C’est sur la place principale de Courmayeur que nous nous retrouvons enfin, dans une foule assez impressionnante (nous sommes 1800 coureurs au départ, + les accompagnateurs). Nous laissons un sac de rechange aux points prévus à cet effet, il sera à disposition à mi-course au Cormet de Roselend, pour ceux qui souhaitent se changer. Il fait encore nuit à 6h, même si nous sommes encore en août. Nous discutons tranquillement, Yves nous raconte avec un grand sourire qu’il vient d’oublier ses bâtons dans la navette, ce qui me panique à sa place (un certain dénivelé positif nous attend) mais n’a pas l’air de le contrarier de trop !
Après un briefing de course inaudible, comme tous les briefings, nous partons enfin, certains ont allumé la frontale ce qui était inutile étant donné que Courmayeur est bien éclairée et que le jour ne tarde pas à se lever. Nous courons tous les trois pour entamer la première montée le long d’une piste de ski. Et là, je montre à mes 2 coéquipiers une chose que je ne pensais jamais voir un jour en trail : une coureuse fait la course… en tongs. Mais oui, en tongs. J’écarquille les yeux pour voir si je ne suis pas encore en train de dormir, mais non. 2 ravitaillements plus tard, j’entendrai des bénévoles en discuter et dire qu’il ne devait pas être permis de la laisser repartir ainsi… l’histoire ne dit pas ce qu’il est advenu de cette coureuse. Arrivés au 1er ravitaillement au col Chécrouit, km 7, nous buvons un coup, je profite des toilettes et Yves nous dit qu’il part devant et qu’on le rattrapera bien. Partis peut être 5 mn après lui, nous ne pourrons jamais le rattraper et Yves finira la course sans nous, arrivant plus d’une heure devant moi ! Il faut dire que les 2 grandes montées suivant le 1er ravito sont des sentiers très étroits, ne permettant pas de doubler. Or, à ce stade de la course les coureurs sont encore en « paquet » et créent ainsi des embouteillages. C’est ainsi qu’avec Philippe nous montons lentement, sans pouvoir doubler, devant parfois nous arrêter. C’est après que l’on se dit que si nous avions su, nous aurions essayé de partir plus vite des ravitos pour se frayer une place plus en avant. Plusieurs fois nous sommes même contraints à l’arrêt en pleine montée. C’est assez frustrant, d’autant qu’en ce début de course nous avons encore les jambes pour monter ! Quoi qu’il en soit le panorama est inoubliable : cette traversée du val d’Aoste nous permet d’admirer la chaîne du mont Blanc vue du versant italien. Nous croyons deviner le Mont Blanc, fort différent de l’autre côté… Plus pierreux, plus pointu… Nous admirons également les nombreux glaciers qui l’entourent, et qui sont la continuité de ceux que l’on peut voir depuis la vallée de Chamonix. (cf photo)
Passage au lac Combal (km 15) où nous attend le 2è ravito. Un petit lac mais magnifique, où se reflètent les montagnes autour et les trailers qui le longent (cf photo). Après la 2è montée, où serpentent toujours des centaines de trailers le long des nombreux virages, c’est l’arrivée au Col Chavanne où nous faisons un arrêt photo et où je me remets de la Nok sur les pieds avant d’entamer une première grande descente vers Alpetta, charmante petite vallée verdoyante. Durant cette descente, nous nous rafraîchissons plusieurs fois dans les petits cours d’eau qui traversent le chemin. J’ai oublié de préciser une chose pourtant fondamentale pour cette course : la chaleur prévue -et effective !- durant les 2 journées de course qui nous attendent. Température annoncée, entre 30 et 35 degrés en vallée… C’est donc régulièrement que nous mouillons nos casquettes dans les torrents, et nous n’oublions jamais de boire très régulièrement.
Après Alpetta et un passage le long d’un petit lac, nous remontons sur le Col du Petit Saint Bernard qui marque la frontière Italie-France. Ravito, et là une bonne surprise, notre premier supporter ! Michel (Martinoli, allias coach Michel pour les intimes) est au ravito et nous encourage, nous rassure sur notre position dans le classement. Nous savons que nous sommes partis un peu en queue de peloton, « coincés » dans les bouchons du début de la course. Il nous dit que nous sommes à une bonne allure et que tout va bien se passer. Quelques Tucs et un bouillon vermicelle, pour manger salé (important quand il fait chaud !) et nous voici repartis pour entamer la descente la plus longue du monde… bon, n’exagérons rien mais quand même, descendre 14 km d’affilée, perso, j’avais jamais fait. La descente nous fait arriver au point le plus bas de la course, Bourg St Maurice, km 51. Elle a lieu en pleine après-midi, la chaleur est écrasante, nous trouvons heureusement plusieurs fontaines ou cours d’eau pour mouiller régulièrement casquette, bras, visage… Des habitants depuis leur jardin nous envoient une brume d’eau fraîche avec leur tuyau d’arrosage. A Bourg St Maurice, je sais que j’aurai la joie de voir Pascal et les enfants qui ont fait le déplacement pour venir nous y encourager. Je les retrouve donc avec grand plaisir, ils m’accompagnent depuis la gare jusqu’au ravito où Pascal m’aide à me ravitailler et remplir mon sac (c’est une des rares zones où l’on peut se faire assister). En arrivant nous croisons Yves qui lui repart déjà, il a gardé une belle avance et Valérie lui a apporté des bâtons tout neufs (sacré Yves, qui fait mine d’avoir oublié ses bâtons pour en avoir des tout neufs ! ;). La chaleur commence à produire ses effets : en arrivant au ravito, je vois passer devant moi une civière, et tous les coureurs affichent des visages bien rouges. De plus, nous commençons à ressentir les effets hélas si fréquents en trail long mais qui là s’annoncent peut être pires avec la chaleur : le manque d’appétit. J’avale quand même un bouillon vermicelle, quelques Tucs et un peu de pain et de fromage, mais le cœur n’y est pas ! Il faut pourtant manger car là nous attend la montée la plus longue du monde… Après Bourg St Maurice il nous faut monter une douzaine de km jusqu’au col de la Forclaz, et ce dès 16h30, à l’heure peut être la plus chaude… il doit faire plus de 32°, la fatigue commence à se faire sentir et la partie la plus dure de la course nous attend. Nous démarrons l’ascension avec Pascal et les enfants qui nous escortent et nous encouragent… La montée démarre très raide et se poursuit inlassablement. Et déjà nous croisons régulièrement des coureurs qui redescendent : sûrement pour rejoindre Bourg St Maurice et abandonner avant de trop s’éloigner en montagne. Nous croisons aussi des trailers qui se sont allongés au bord du chemin pour récupérer, d’autres qui vomissent leur ravito… la chaleur commence à faire beaucoup de victimes, et intérieurement je souhaite l’arrivée prochaine de la nuit. Passage ensuite devant deux forts (Fort du Truc et Fort de la Platte), construits par Vauban pour se protéger à l’époque des invasions italiennes. Pascal et les enfants nous font la surprise de venir nous voir également dans cette montée, juste avant le 1er fort, où ils ont pu monter en voiture et où ils arrivent juste avant notre passage.
Je sais qu’il faut continuer non seulement à bien boire, mais aussi à bien s’alimenter, mais là cela devient vraiment difficile. Rien de ce que j’ai dans mes réserves ne me fait envie, et je sens que si je mange je risque de tout renvoyer direct. Le ventre plein d’eau et balloté par la course n’arrange en rien la digestion. Philippe quant à lui est pris à plusieurs reprises de violentes crampes aux cuisses et est obligé de s’arrêter le temps qu’elles passent. Je ne luis suis pas d’un grand secours, ne sachant comment les faire passer… Cela nous permet ceci dit de faire quelques pauses dans cette interminable montée et d’admirer la superbe vue sur le fond de vallée avec Bourg St Maurice. C’est juste avant la tombée de la nuit que nous arrivons tout en haut, à 2500 m d’altitude, au seuil du Passeur de Pralognan, ce fameux passage qui descend très raide sur 200 m dont Pascal (qui avait fait la TDS trois ans auparavant) m’avait tant parlé. Nous espérions y passer vers 20h30, c’est-à-dire juste avant la nuit. Mais à 21 h nous sommes encore à 15 mn du Passeur. Nous sommes donc contraints de mettre les frontales peu avant. Le passage est effectivement plus que raide, des cordes tendues nous aident à le descendre. Peu après, nous gagnons le fameux Cormet de Roselend, km 67 où Pascal et les enfants nous attendent ; eux ont fait le trajet depuis Bourg St Maurice en voiture, après y avoir mangé une bonne pizza avec Valérie qui était venue attendre Yves. C’est le gros ravito central de la course, où nous sommes censés prendre un vrai repas avec pâtes etc… Seulement voilà, il nous est encore plus difficile qu’en bas d’avaler quoi que ce soit. Encore une fois je me force à avaler une soupe, qui passe à peu près. Philippe lui s’arrête devant son bol et commence à prendre la couleur de celui-ci (euh.. blanc.). Il me dit d’emblée « J’me sens pas bien là, j’vais tomber, emmène-moi voir les médecins »… Mon premier réflexe c’est de mettre mes mains derrière lui pour ramasser les morceaux, mais il se lève et je suis bien obligée de le suivre ! A l’infirmerie, on s’occupe de lui, mais déjà Philippe se déclare incapable de repartir. Il souffre en fait d’hypoglycémie, n’ayant quasiment pas mangé depuis Bourg St Maurice. Il doit être 23h et il nous reste une heure de marge avant la barrière horaire. Philippe me dit de continuer malgré mes tentatives pour le convaincre de réfléchir encore un peu. Plus tard en en discutant il me dit qu’il aurait peut-être pu se reposer un peu, se ravitailler et repartir, mais sur le moment il faut bien reconnaître que face à l’épuisement il est bien difficile de prendre des décisions en toute lucidité.
C’est donc seule que je repars du Cormet de Roselend, bien désolée de devoir laisser Philippe et aussi, il faut bien le dire, un peu inquiète de devoir affronter la nuit toute seule. Nous avions déjà fait en reconnaissance au mois de juillet cette 2è portion de course, de Cormet de Roselend jusqu’à la fin. La connaissance du parcours devrait m’aider à affronter plus facilement le chemin, mais après quelques km cela devient plus difficile. Le passage le long du passage du Curé, adorable petit chemin creusé dans la roche le long d’un torrent, se passe bien, heureusement j’ai pu profiter de sa beauté de jour pendant la reco. Petit ravito à la Gitte, puis montée (encore !) vers le col du Joly. C’est peut être durant cette montée que j’ai vécu les heures les plus dures de la course. Le chemin me paraît interminable par rapport à ce que nous avions fait en reco, j’ai l’impression qu’il nous fait prendre des détours supplémentaires alors que nous entendons au loin les haut-parleurs du ravito du Col du Joly. De plus, vers 3-4 h du matin, le sommeil me prend tout d’un coup, sans prévenir. Je m’accroche derrière un coureur pour ne pas m’isoler de trop, mais je vois bien que ma trajectoire n’est plus très rectiligne et qu’à plusieurs reprises mes yeux se ferment et que je dois faire des micro-sommeils. Ce n’est sans doute pas très grave mais je me force à garder les yeux ouverts, craignant surtout de chuter sur un chemin assez caillouteux et irrégulier, et/ou de me faire une entorse toute bête et de ne pas pouvoir continuer. Arrivée au bout de cette interminable montée arrive enfin le Col du Joly, après avoir traversé une « station » de traite mobile avec le fermier conduisant ses vaches à son petit camion de traite. Pour lui c’est déjà le début de la journée, (il doit être dans les 4h30 du matin) et il nous regarde passer d’un air un peu amusé… Je me dis à ce moment-là qu’on mène des vies quand même fort différentes, et me demande un peu aussi non pas ce que je fais là, mais pourquoi nous dépensons tant d’énergie et passons la nuit dehors alors que d’autres se lèvent tôt et dépensent leur énergie pour faire quelque chose de très concret, traire les vaches et gagner leur vie !!
Col du Joly donc, km 86, frontière entre la vallée du Beaufortin que nous venons de quitter et le val Montjoie (avec Les Contamines, St Gervais) sur lequel je vais redescendre. Ravito encore laborieux, que je prends à la table de coureurs qui font une petite sieste sur les bancs ou accoudés sur la table. Re-crème Nok, et c’est reparti. Le sommeil m’a quitté en arrivant à ce ravito, et je sais que le jour va bientôt se lever ce qui a priori devrait aider à me réveiller tout à fait. Je sais aussi qu’à ce stade de la course, sauf catastrophe, je devrais arriver au bout. Certes, la fatigue est là mais je n’éprouve pas de difficulté à courir, les jambes ne me font pas souffrir, et j’arrive à manger un minimum. C’est assez difficile à expliquer, mais il y a des moments dans la course où l’on « sent » que ça va le faire. Pourtant, tant de choses peuvent encore arriver !
La descente sur Notre Dame de la Gorge se passe bien, j’envoie un sms à Pascal pour dire que je serai bientôt aux Contamines où il a prévu de me voir (sans les enfants cette fois, car il est encore tôt et les enfants dorment à l’appart à ST Gervais). Je l’y retrouve donc, vers 9 h du matin, et j’ai le plaisir également d’y retrouver Philippe (un autre, un ami de La Rochelle qui était en vacances dans le coin). Pas grand monde aux Contamines au petit matin, mais un ravito et 2 garçons qui m’escortent pour repartir et font avec moi les premiers km de la montée qui part du centre des Contamines jusqu’au chalet du Truc (non, je n’ai pas oublié le nom de ce chalet, il s’appelle comme ça !). La montée au début étant très raide, cela m’aide beaucoup d’être accompagnée. Ils me laissent continuer quand commence le sentier dans les bois. Chalet du Truc, chalet des Miages, avant d’attaquer la fameuse montée raide du col du Tricot –où là, on ne tricote pas du tout, on a intérêt à rester concentré sur la montée. Juste avant cette montée, en bas, après un coup de fil à mes parents, j’écarquille les yeux car je crois reconnaître Agnès (Savel, du club)… je m’approche encore, mais oui c’est bien elle ! elle nous a fait à Yves juste avant et à moi le plaisir de venir d’Evian (où elle passait ses vacances) jusqu’au col du Tricot. C’est assez irréel et incroyable, je suis ravie de cette aide supplémentaire qu’elle a fait l’amitié de m’apporter. C’est donc en discutant avec elle que j’affronte la montée du Tricot que je redoutais tant. Arrivées en haut, nous discutons un peu, prenons des photos. Puis je la quitte pour continuer ma route : descente accidentée en direction de Bellevue, en passant auparavant sur la fameuse passerelle qui enjambe un torrent au niveau du bas du glacier du Bionnassay. Passage assez impressionnant sur cette passerelle faite de planches espacées et de 2 cordes pour se tenir.. Heureusement la reco m’avait permis de l’apprivoiser ! Je demande au coureur qui me suit d’attendre que je sois arrivée de l’autre côté pour qu’il l’emprunte à son tour car à deux en même temps, ça bouge un peu…
Arrivée à Bellevue (station du TMB qui monte de St Gervais au nid d’Aigle), je bois un coup à un mini point d’eau-pointage, puis descente, assez longue, par le sentier en forêt puis enfin sur la route, jusqu’aux Houches. Je sais qu’arrivée aux Houches je n’aurai « plus que » 8 km à peu près plats (tout est relatif en montagne…) jusqu’à la délivrance à Chamonix ! Je suis toujours plutôt en forme, j’ai même tendance à accélérer légèrement le rythme. La descente me paraît toutefois bien longue, et c’est en bas juste avant l’église, que j’ai la joie à nouveau de voir des supporters, et en nombre en plus ! Pascal et les enfants, Philippe qui après son abandon était rentré la nuit avec Pascal en voiture, Valérie qui venait de voir passer Yves, Tristan et Valérie, Manue… que de monde ! et quel plaisir ! Dernier ravito cette fois à côté de l’église des Houches, et me voici repartie pour gagner Chamonix le long du sentier qui longe l’Arve en sous-bois. Au niveau des Gaillands, hameau à l’entrée de Chamonix, je me dis que je peux commencer à savourer mon arrivée, et que là, plus rien ne peut m’arriver. Je double quelques coureurs sur cette portion, et me dis -ce que je me dis à peu près à toutes les courses- que si j’avais su j’aurais pu aller un peu plus vite tout le long, vu que je suis bien et que j’ai les jambes pour courir… Je commence à croiser des gens à pied, en voiture qui m’encouragent chaleureusement, un homme me dit « Allez, profite, c’est le meilleur moment, là ! » Effectivement, toute la traversée de Chamonix, que je fais en courant, est un moment inoubliable, et je sais qu’il faut que je profite de chaque pas. Dans la rue principale, tous les gens attablés (il est 13h30 environ) crient leurs encouragements et applaudissent, c’est grisant. Je sais aussi que Pascal et les enfants m’attendent au niveau de la Poste, juste avant la dernière ligne droite qui arrive jusque sous l’église, en plein centre de Chamonix. Je les y rejoins et leur prend la main pour finir cette fameuse ligne droite -et cette fameuse course !-. C’est aussi pour eux que j’ai couru, et grâce à eux, aux conseils de Pascal avant et pendant la course, à leur soutien et à leurs encouragements que j’ai pu finir. J’arrive finalement en 31h39, moins d’une heure ½ avant la barrière horaire qui était à 33h… y’avait rien de trop ! mais mon objectif premier était d’arriver en bon état, si possible en 32h. Objectif atteint, donc, même si intérieurement je me redis que j’aurais pu faire mieux !!
Arrivée, photos, bises à tout le monde –Yves et Valérie étaient là ainsi que les deux Philippe, Fanfan,… Je récupère la fameuse polaire sans manche Columbia (enfin, polaire…. une espèce de veste imperméable sans manches et sans capuche, il faudra un jour qu’ils expliquent le concept…)
J’ai ensuite un peu de mal à marcher et surtout à m’asseoir pour récupérer un peu à l’ombre de l’église… mais à la fin de la journée, après une bonne douche, je dois dire que je n’ai pas éprouvé spécialement de « mal aux jambes », très bizarrement… les mauvaises langues diront que je n’ai pas forcé (ça doit être un peu vrai !), en tous cas j’ai pu récupérer facilement et cela contribue à laisser de la course un très bon souvenir. Le plus gros souci durant cette course aura sûrement été le manque d’appétit et la difficulté à bien s’alimenter, mais cela ne m’a heureusement pas empêché de la finir, ça aurait pu être le cas, je le sais.
Cela paraît tellement loin aujourd’hui ! retour en vallée de Chevreuse, rentrée des classes, boulot… les choses s’enchaînent mais heureusement restent les très beaux souvenirs, ceux des paysages, sublimes, et de l’amitié partagée avec mes compagnons de course, des rencontres avec d’autres coureurs et avec tous les bénévoles qui ont été adorables.
Merci à tous ceux qui m’ont encouragée et supportée (dans tous les sens du terme !) avant et pendant la course, et qui m’ont fait confiance dans mes inévitables moments de doute ; merci pour tous les petits messages qui font tellement de bien au moral, et merci à Pascal de toute l’aide qu’il m’a apportée, et pour ses précieux conseils.